5 points importants à retenir du premier évènement #EnablingTheFuture
Le 15 décembre dernier, Enabel a organisé sa première édition de l’évènement #EnablingTheFuture dans ses bureaux de Bruxelles. Cet évènement hybride a réuni 150 participant·es de la scène de l’innovation sociale tant dans le Sud que le Nord global, visant une action conjointe et un investissement dans l’innovation en vue d’accélérer la réalisation des Objectifs de développement durable.
Envie de savoir ce que nous avons appris au cours de cet évènement ? Voici nos 5 points importants à retenir :
1. On recherche : des actions audacieuses et des personnes courageuses
Sommes-nous fait·es pour échouer ? C’est avec cette question provocante que Gerald Abila, fondateur de BarefootLaw, a ouvert le débat entre expert·es sur le thème « innover avec impact »
À seulement 7 ans de leur échéance, nous sommes loin d’avoir atteint les Objectifs de développement durable qui guident l’Agenda 2030. Gerald et son équipe n’ont pas accepté le statu quo et se sont fixé une ambition audacieuse pour 2030 : faciliter l’accès à la justice et au droit pour 50 millions de personnes à travers l’Afrique, et ce, grâce aux technologies numériques. Selon Gerald, les enjeux sont importants : « L’innovation n’est pas une affaire de choix. Il faut innover ou mourir. »
Jean Van Wetter, Directeur général d’Enabel, appelle à un investissement conjoint dans l’innovation sociale et à un engagement renouvelé en faveur de l’Agenda 2030.
« Ces dernières décennies, l’ensemble du secteur de la coopération internationale s’est progressivement transformé pour passer d’un mouvement rebelle, qui entendait combattre l’injustice, à une industrie régie par des mesures de contrôle et la bureaucratie. Ce n’est pas la roue que nous devons réinventer, mais nous-mêmes. »
En tant que Directeur général, il s’est fixé l’ambition claire de faire d’Enabel un pionnier de l’innovation. « Il en va de notre obligation morale envers les générations actuelles et futures d’innover et j’encourage notre personnel et nos partenaires à faire preuve d’audace et à remettre en question le statu quo. C’est la seule manière de demeurer pertinent pour nos partenaires d’Afrique et du Moyen-Orient, où les choses évoluent extrêmement vite. »
2. Copier-coller du modèle de la Silicon Valley : n’essayez pas cela chez vous
« Mettre son programme d’innovation dans un porte-documents, voyager de la Belgique vers une communauté quelque part en Afrique, ouvrir le porte-documents et commencer à enseigner aux gens comment innover. Voilà la recette de l’échec. »
« Le discours prédominant sur l’ ‘innovation’ dans le secteur du développement est imprégné de valeurs, d’images et de concepts tirés d’une perspective occidentale plutôt limitée sur l’innovation », explique la Dr Andrea Jimenez.
Maîtresse de conférence à l’Université de Sheffield, Andrea a à son actif plus de 10 ans de recherches sur l’innovation dans le secteur du développement. De nombreuses tentatives ont été faites pour copier-coller le modèle de la Silicon Valley avec tous ses outils, approches et méthodes dans d’autres contextes, en essayant d’élever des licornes technologiques avec du capital-risque dans des pôles d’innovation consacrés : du Kenya à l’Équateur.
« Il a été prouvé que ces initiatives servent principalement les élites locales et exacerbent les inégalités, plutôt que de contribuer à un véritable développement local. » Andrea nous invite à repenser radicalement nos modèles d’innovation en prenant conscience de la dynamique du pouvoir et en favorisant des partenariats et des processus qui répondent aux réalités du terrain.
Et comme le souligne Gérald, « Nous devons commencer à écouter les entrepreneur·es sur le terrain ».
3. La réalité : la scène africaine de l’innovation est en pleine effervescence
Dans le domaine des miniréseaux électriques, des services bancaires mobiles et de nombreuses innovations sociales, les pays d’Afrique font figure de pionniers et devancent le Nord global. Et, en raison de sa population exceptionnellement jeune et dynamique, nous pouvons nous attendre à ce que ce continent soit le théâtre de nombreuses autres innovations dans les années à venir.
Sur la base de son expérience à la tête d’un pôle d’innovation à Mombassa (Kenya), qui a déjà servi d’incubateur à 200 startups, Olivier Vanden Eynde (Close the Gap) nous confie :
« Les écosystèmes d’innovation des villes africaines se développent à un rythme rapide. Leurs compétences, leur passion et une véritable nécessité d’innover sont les moteurs de ces entrepreneur·es innovant·es. Ils et elles le font parce que, sans cela, personne ne le fera. »
Malgré un écosystème en pleine effervescence, l’image générale de l’innovation en Afrique est toujours empreinte de préjugés et de discours opposant le Nord au Sud. Cela se reflète encore dans les mentalités et les approches de nombreux acteurs et interventions traditionnels du développement.
4. Les innombrables nuances de la « mise à l’échelle »
Dans un débat relatif à l’innovation, la question de la mise à l’échelle n’est jamais très loin. C’est là l’un des aspects cruciaux des recherches menées par Lena Kalukuta Mahina, qui étudie les initiatives d’économie circulaire en RD du Congo, au Maroc et au Burkina Faso.
« Nous partons de solutions innovantes locales et identifions les facteurs qui peuvent les rendre reproductibles dans d’autres contextes et durables dans le temps, grâce à un modèle économique financièrement viable et des investissements publics ou privés. »
Une perspective partagée par Jean : « Je ne pense pas que passer de subside en subside soit la voie à suivre. Nous avons besoin d’une perspective de modèle économique pour identifier le potentiel des innovations à avoir un impact à grande échelle et à ajouter à l’équation la redevabilité, la durabilité et l’optimisation des ressources. »
Gerald plaide pour une perspective plus large de la mise à l’échelle :
« Nous devons trouver un nouveau sens au débat ‘lucratif versus non lucratif’. Certaines innovations étant tellement uniques, toute la magie consiste à les maintenir à un échelon local. Le passage à l’échelle depuis l’espace non lucratif, ce n’est pas la même chose que le modèle de la Silicon Valley qui fait l’apologie du toujours plus et toujours plus grand. Parfois, mise à l’échelle rime avec approfondissement au sein des communautés. »
Il est clair qu’il n’existe pas d’approche de mise à l’échelle unique et que les stratégies de mise à l’échelle doivent toujours être adaptées à leurs contextes spécifiques.
5. La voie à suivre : apprendre comme des pairs, conclure des partenariats d’égal à égal
Nonobstant les différences de contextes, nombre des innovateur·rices social·es tant au Nord qu’au Sud œuvrent à des solutions novatrices à des défis similaires : la science citoyenne pour lutter contre la pollution de l’air, des programmes de codage pour aider les personnes vulnérables et les jeunes à trouver un emploi ou encore des moyens de soutenir les femmes dans leur lutte contre la violence sexuelle.
Raison pour laquelle Jean encourage les personnes du Nord global à s’intéresser de plus près aux solutions créatives développées par des entrepreneur·es africain·es. « Ces innovations ne pourraient-elles pas, elles aussi, s’avérer utiles dans un contexte européen, voire belge ? »
Une grande place est encore dévolue à l’apprentissage par les pairs entre innovateur·rices du monde entier.
Lena et Gerald nous donnent des exemples d’enseignements collectifs que nous pourrions tirer de cette première édition de l’évènement #EnablingTheFuture.
Lena : « Nous devons transcender le discours paternaliste Nord-Sud et favoriser de véritables partenariats d’égal à égal. »
Gerald : « Une première chose que nous pouvons faire collectivement est de reconnaître nos positions privilégiées et de surmonter les préjugés que cela peut engendrer lors de la création de partenariats et de la conception d’innovations sociales. Écoutez réellement les communautés que vous vous efforcez de servir et impliquez-les dans ce que vous faites. »
L’évènement #EnablingTheFuture vise à combler cette niche en offrant une plateforme où les innovateur·rices et les organisations d’appui à l’innovation tant du Sud que du Nord peuvent se rencontrer et échanger entre pairs.
Rejoignez-nous dans cette aventure mondiale : prenez contact avec vos interlocuteur·rices chez Enabel ou envoyez-nous un message à l’adresse innovation@enabel.be