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02 novembre 2020
Stop aux mutilations génitales féminines
Faire, ensemble, du Burkina Faso un endroit plus sûr pour les filles
On estime à 200 millions le nombre de filles et de femmes à travers le monde à avoir subi des MGF et rien qu’en 2020, cette menace pèse sur 4,1 millions de filles.* Les femmes subissent fréquemment les conséquences des mutilations génitales à vie.
Les mutilations génitales féminines (MGF) sont une pratique qui consiste à altérer ou léser les organes génitaux de la femme pour des raisons non médicales. Grave violation des droits de la personne, cette pratique traditionnelle ancestrale est un problème de santé publique induisant des risques pour la santé tant physique que psychologique. Les mutilations génitales féminines sont presque toujours pratiquées sur des mineures et constituent de ce fait également une violation des droits de l’enfant.
Au Burkina Faso, cette pratique est illégale. Et pourtant, elle fait encore chaque jour des victimes parmi les femmes et les filles. Les normes sociales et la pression des pairs jouent un rôle majeur à cet égard. Dans la région du Centre-Est du Burkina Faso, Enabel enquête sur les motifs sous-jacents de cette pratique, en collaboration avec le gouvernement, le personnel de santé, les organisations de femmes et de jeunes burkinabè, ainsi que les chef·fes de communauté. L’objectif est d’optimiser la stratégie de sensibilisation et de lutter de manière ciblée contre les MGF..
Cadre légal
En 1996, le Burkina Faso a adopté une loi sanctionnant cette pratique. Révisée en 2018, ladite loi prévoit désormais des peines de prison et des amendes supplémentaires.
Une enquête gouvernementale réalisée en 2015 montre que 84,7 % des femmes interrogées pensent que les MGF devraient être progressivement éliminées. Les femmes qui vivent dans les villes rejettent cette pratique plus fréquemment que celles vivant à la campagne. Il n’empêche que 18 % des Burkinabè – hommes et femmes confondu·es – pensent que cette pratique devrait être maintenue.***
Le gouvernement du Burkina Faso, en collaboration avec plusieurs partenaires de développement, a déployé des efforts pour mettre en place des campagnes de sensibilisation, qui ont produit des résultats positifs prudents. La prévalence chez les filles âgées de 15 à 19 ans est de 42,4 %, alors qu’elle est de 87,4 % pour celles âgées de 45 à 49 ans.** Il se peut dès lors que les cas d’excision diminuent de génération en génération.
Le cadre législatif ne semble toutefois pas suffisant pour éradiquer totalement cette pratique.
Une loi à elle seule ne suffit pas
La mise en place de nouvelles mesures visant à renforcer la loi s’est accompagnée d’autres défis à relever. Parfois, les femmes excisées au Burkina Faso ne font pas appel à des soins médicaux appropriés précisément en raison de ces nouvelles mesures.
Ainsi, elles n’osent souvent pas accoucher dans un hôpital de peur que la sage-femme ou le gynécologue n’avertisse la police comme l’exige la loi. Ou encore, des jeunes filles malades, ayant subi des MGF, ne sont pas emmenées chez un·e médecin, car celui ou celle-ci pourrait établir lors de la visite médicale que la jeune fille a été excisée.
Par conséquent, il est essentiel d’investir dans une éducation culturellement adaptée et dans des activités de sensibilisation du public pour accompagner ces lois afin de continuer à faire reculer cette pratique et de combattre ses effets secondaires négatifs.
Comprendre le pourquoi
Mais quelle est alors la meilleure façon de procéder ? Afin d’obtenir une réponse à cette question, il est important d’examiner les raisons invoquées par les communautés elles-mêmes pour justifier la poursuite des MGF. Des entretiens de recherche révèlent les motifs suivants :
la culture et la tradition, des raisons d’ordre social comme la possibilité de se marier, des avantages perçus pour la santé, la pression des ancien·nes, la régulation du désir sexuel des femmes, et certaines répercussions comme l’aliénation au sein de la communauté et de son réseau de référence.
Malgré l’adoption de la loi, la pratique se poursuit toujours 24 ans plus tard. Et c’est précisément la raison pour laquelle Enabel veut réellement comprendre pourquoi ces arguments sont invoqués et pourquoi ils sont jugés suffisamment importants pour perpétuer les MGF. En collaboration avec le gouvernement et les citoyen·nes de la région du Centre-Est, nous entendons trouver des solutions durables.
À cette fin, nous travaillons en partenariat avec des instituts de recherche au Burkina Faso et en Belgique. L’Université de Liège, l’Université catholique de Louvain-la-Neuve, l’Université de Gand et l’Institut Supérieur des Sciences de la Population de Ouagadougou s’associent pour réaliser une vaste étude socioanthropologique.Les premiers résultats sont attendus au printemps 2021 et seront progressivement affinés.