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08 juin 2021

Ponts voûtés en maçonnerie en Tanzanie

Une innovation ancrée dans l’histoire

L’accès des communautés rurales aux écoles, hôpitaux et marchés ainsi qu’à leurs emplois dépend de la possibilité de traverser des rivières dangereuses. Aussi, une traversée sûre, tout au long de l’année, sur un pont en arc de pierre constitue l’un des fondements du développement durable.

La croissance et la dispersion de la population en Tanzanie mettent à rude épreuve les infrastructures de mobilité. Malheureusement, le gouvernement national a du mal à faire face à l’augmentation rapide de la demande et les projets d’infrastructure indispensables faisant appel à des techniques conventionnelles, comme l’acier et le béton armé, s’avèrent souvent très coûteux.

La technologie éprouvée des ponts en arc de pierre, par contre, permet une approche décentralisée intégrée aux structures des gouvernements locaux. Cette méthode de construction rentable associée à une forte appropriation locale garantit une amélioration durable des routes rurales.

 

Men constructing a stone arch bridge in Tanzania

 

Matériaux locaux, main-d’œuvre locale


 

“Nous n’avons pas de moyen sûr d’entrer ou de sortir de notre village, à cause de la grande rivière Kaseke. Elle nous complique la vie, surtout lorsqu’il pleut beaucoup, car nous ne pouvons alors pas du tout la traverser. Avec le pont, il y a enfin un moyen sûr d’accéder à notre village et de transporter nos produits vers d’autres marchés.”
Magdalena Leonard Kagege – Maire de Nyabigufa

Les techniques de construction de ponts les plus couramment utilisées sont celles à base de béton ou d’acier, qui nécessitent un apport important de matériaux industriels et une faible quantité de main-d’œuvre. Or, dans les zones rurales de Tanzanie, l’utilisation de matériaux industriels est très coûteuse, alors que la main-d’œuvre est bon marché.

La technique de l’arc de pierre capitalise cette situation en recourant à des matériaux locaux aisément disponibles, tels que des pierres, du sable et de l’eau pour préparer le mortier, et du bois, et ce, dans un processus à forte intensité de main-d’œuvre. Cela se traduit en moyenne par une réduction de 80 à 85 % des coûts de construction, ainsi que par une réduction de 50 à 80 % des émissions de carbone grâce à l’utilisation moindre de ciment et d’acier d’armature par rapport aux techniques de construction traditionnelles.

Les ponts en maçonnerie évitent également certains des inconvénients des solutions conventionnelles, comme l’utilisation de ponceaux en acier ou en béton. Ces derniers se brisent non seulement souvent sur les mauvaises routes lors de leur transport depuis les centres industriels, mais, du fait de leur poids relativement faible, ils risquent également d’être emportés par les eaux lors d’inondations. Qui plus est, de tels éléments préfabriqués sont parfois volés : les gens les déterrent et essaient de les revendre pour gagner un peu d’argent.

Les ponts en arc de pierre sont construits depuis plus de 2.000 ans et certaines des premières structures sont même encore utilisées aujourd’hui. Le pont Fabricius à Rome, par exemple, comporte deux arches de 24 m chacune et a été achevé il y a plus de 2000 ans. La conception et l’exécution reposent toutes deux sur des règles empiriques simples qui ont fait leurs preuves au fil du temps. Cela permet d’éviter la conception complexe et l’ingénierie de précision inhérentes aux ponts en acier et en béton.

 

Plan explaining how the technology of stone arch bridges work
Enabel opte pour cette technologie rentable dans l’optique d’obtenir les mêmes résultats positifs qu’avec des ponts en béton ou en acier plus conventionnels, mais sans nécessiter un soutien financier important de la part du gouvernement central. Cette approche accroît l’autonomie des gouvernements locaux et leur permet d’améliorer davantage de routes rurales sans avoir à augmenter leur budget.

men constructing a stone arch bridge in Tanzania.

 

Participation communautaire


 

La technique de l’arc de pierre permet de réaliser une économie de 80 % par rapport aux ponts en béton ou en acier et peut être mise en œuvre par le biais d’une procédure d’appel d’offres public, ce qui .

Il est également possible d’impliquer le village et l’Agence tanzanienne des routes rurales (Tanzanian Rural and Urban Roads Agency, TARURA) en répartissant les responsabilités : le village fournit les pierres et le sable, TARURA assure la supervision et Enabel apporte un soutien technique. Outre les avantages en termes de coûts, cette approche permet de créer un sentiment d’appropriation, de renforcer les capacités et d’autonomiser le leadership local.

Si le budget annuel moyen de TARURA permet de financer 1 pont en béton par le biais d’une procédure d’appel d’offres public, ce même budget peut être utilisé pour en financer 5 en arc de pierre via un appel d’offres public, voire 10 si la communauté locale est mise à contribution.

Si le village participe en fournissant les pierres, le sable, l’eau et le bois, sa contribution la plus importante est néanmoins la mise à disposition de main-d’œuvre occasionnelle. La construction du pont n’est dès lors plus perçue comme une intervention du gouvernement, et donc pas une responsabilité locale, mais comme un bien communautaire qui requiert l’attention de la communauté tant avant que pendant et après la construction.

car driving across a stone arch bridge in Tanzania

Regard sur l’avenir


Enabel a rédigé un manuel de construction et l’a traduit en swahili pour permettre à TARURA de l’utiliser.

Grâce à l’étroite collaboration avec les responsables de TARURA pendant le projet, la technique suscite de plus en plus d’intérêt. Elle a ainsi déjà été promue par le directeur national de TARURA et trois ponts en arc sont actuellement en cours de construction sans le soutien d’Enabel et en dehors de notre zone d’intervention, qui se limite actuellement à la région nord-est de Kigoma. Dans la région de Kigoma, TARURA a également commencé la construction de 2 ponts en arc de pierre en dehors du projet d’Enabel.

 

Le projet en quelques chiffres


  • La Tanzanie compte quelque 55 millions d’habitant·es et connaît un taux de croissance annuel de 3 %.
  • La construction des ponts a commencé en 2018.
  • Objectif pour 2022 : 70 ponts achevés
  • Les portées des ponts vont de 1,1 à 31 m
  • Les budgets des ponts vont de 2.400 EUR à 35.500 EUR. Ils sont financés à 80 % par le projet d’Enabel et à 20 % par les contributions locales, qui sont généralement des contributions en nature telles que des pierres
  • 97 % des villageois et villageoises disent tirer des bénéfices personnels de la construction du pont
  • 99 % des villageois et villageoises disent percevoir des bénéfices pour leur communauté depuis la construction du pont
  • Les frais financiers sont inférieurs de 80 % à ceux d’un pont classique équivalent en béton armé
  • Les émissions de carbone sont inférieures de 80 % à celles d’un pont classique équivalent en béton armé, et ce, grâce à la moindre utilisation de ciment, à la construction sans acier d’armature et, partant, au transport réduit de matériaux industriels

 

Photos: © Enabel

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